samedi 26 février 2011

Gaddafi et l'abolition du salariat

Voici ce que le dictateur fou de la Libye a déclaré en 1988. Bien entendu ces ne sont que des mots et il est fou. Mais il montre que même un fou peut parfois émettre une vérité :

DECLARATION DU GUIDE DE LA REVOLUTION A L'OCCASION DU 1ER MAI. TRIPOLI 2 AL MAA ( AGENCE JAMAHIRIYA PRESSE )

A L’OCCASION DU 1ER MAI, LE GUIDE DE LA REVOLUTION A FAIT LA DECLARATION SUIVANTE A LA JANA :

" LE 1ER MAI DE CETTE ANNEE EST LE JOUR OU LES SALARIES SONT BAFOUES PARTOUT DANS LE MONDE, ALORS QUE DES MILLIONS DE SALARIES CONTINUENT D’ETRE EXPLOITES ET NE SONT TOUJOURS PAS LIBERES DE L’ESCLAVAGE DU SALARIAT DANS LEQUEL LES MAINTIENNENT LES DIRIGEANTS ET LES PATRONS POUR TIRER PROFIT DE LEUR TRAVAIL ET DE LEUR SUEUR ".

" LE SALUT DE CES MILLIONS DE SALARIES DANS LE MONDE RESIDE DONC DANS L’ABOLITION DU SALARIAT, DE CETTE SERVITUDE. LES TRAVAIL LEURS DOIVENT TRANSFORMER CE JOUR DE SERVITUDE EN JOUR DE RESIS TANCE A CES MENSONGES ET AUX FORCES D’EXPLOITATION EN MARCHANT SUR LES USINES ET TOUS LES LIEUX DE PRODUCTION, POUR GERER PAR EUX MEMES, RECUPERER TOUTE LEUR PART DE PRODUCTION ET ABOLIR A JAMAIS LE SALARIAT ".

" L’ERREUR QUI PREVAUT EN CE JOUR DANS LE MONDE MONTRE QUE LA LIBERTE DES TRAVAILLEURS MANQUE, OU QU’ELLE EST TOTALEMENT PERDUE. CETTE LIBERTE NE PEUT SE REALISER QUE SI LES TRAVAILLEURS S’ENTENDENT POUR S’AFFRANCHIR DE LA SERVITUDE DU SALARIAT. LES PATRONS DEVRONT ALORS ACCEPTER LE FAIT ACCOMPLI, ET DISPARAITRE ".

" LA VERITABLE FETE DES TRAVAILLEURS EST LE 1ER SEPTEMBRE 1978, JOUR OU LES SALARIES SE SONT LIBERES EN TERRE DE JAMAHIRIYA DETRUISANT LES FOYERS D’EXPLOITATION OU QU’ILS SE TROUVENT ET PRENANT POSSESSION DES USINES ET DES LIEUX DE PRODUCTION POUR DEVENIR ASSOCIES."

" LE LIVRE VERT PRESENTE LA TROISIEME THEORIE MONDIALE, SEUL MOYEN DE LIBERER L’HUMANITE DE L’OPPRESSION ET DE L’ EXPLOITATION ET TRACE LA SEULE VOIE DE L’EMANCIPATION FINALE DE TOUS LES TRAVAILLEURS. TOUS LES TRAVAILLEURS DU MONDE DOIVENT S’INSPIRER DE CETTE THEORIE POUR CONSACRER LEUR LIBERTE ET ABOLIR L’ESCLAVAGE DU SALARIAT ".

" LES SALARIES AUSSI BIEN SOIENT LEURS SALAIRES, SONT UNE SORTE D'ESCLAVES, ESCLAVES D'UN MAITRE QUI LOUE LEUR FORCE DE TRAVAIL. "

" TOUS LES DISCOURS-PRONONCES AUJOURD'HUI N’INCITENT PAS LES TRAVAILLEURS A SE LIBERER DE LA SERVITUDE DU SALARIAT. ILS CONSACRENT AU CONTRAIRE L’ EXPLOITATION. LES TRAVAILLEURS NE DOIVENT DONC PAS LEUR PRETER ATTENTION. "

dimanche 20 février 2011

La crise financière : évitable ?

Fin janvier la Financial Crisis Inquiry Commission (« Commission d’enquête sur la crise financière ») établie par le gouvernement aux Etats-Unis a publié son rapport. Elle a conclu que la crise de 2007 et 2008 a été le résultat de « l'action et de l’inaction de l'homme, et non pas de la Mère Nature ou des modèles informatiques détraqués », mais « d'erreurs humaines, d’erreurs de jugement et des méfaits » et a pu donc être évitée. « Bien que le cycle économique ne puisse être abrogé, une crise de cette ampleur aurait pu être évitée », la Commission fait valoir. « Les événements profonds de 2007 et 2008 », dit-elle, « ne sont ni des bosses sur la route, ni une inclinaison accentuée dans les cycles financiers et commerciaux que nous avons appris à attendre dans un système économique de marché libre. »

De toute évidence, la crise a été le résultat, même involontaire, de décisions prises par des humains à se comporter d'une façon particulière, mais ce n'est pas cela qui est en cause. Nous avons besoin de savoir pourquoi les décideurs économiques impliqués ont pris les décisions qu'ils ont faites. Quel était le contexte de leurs décisions ? Quelles étaient les contraintes qui agissaient sur eux ?

La force motrice du capitalisme est la recherche du profit par des entreprises concurrentes. Comme le dit la Commission, « dans notre économie, nous nous attendons à ce que les entreprises et les individus font des bénéfices... » S’il y a une occasion de réaliser un profit d'une certaine activité, les entreprises dans ce domaine iront le chercher. Si les profits sont suffisamment élevés, d'autres entreprises entreront sur le terrain pour partager la manne.

C'est ce qui s'est passé aux États-Unis. De 1997 à 2006, il y a eu un boom dans la construction et l’achat des maisons. On pouvait faire des bénéfices substantiels en prêtant de l'argent soit directement aux acheteurs de maison soit aux sociétés qui le font. En mesure d'emprunter facilement à des taux relativement bas d'intérêt, les banques d'investissement de Wall Street ont décidé de prendre sur l'acte, et dans une grande manière :
« Les grandes banques d'investissement et sociétés de portefeuille bancaire », indique le rapport, « se sont concentré leurs activités de plus en plus sur les activités commerciales à risque qui produisent des bénéfices considérables (« hefty profits »). »
La perspective de faire « des bénéfices considérables » en prêtant de l'argent pour construire et acheter des maisons les a amenés à emprunter de l'argent de plus en plus de prendre part à la chasse après eux:
« Dans les années qui ont précédé la crise, un trop grand nombre d'institutions financières, ainsi que trop de ménages, ont emprunté à la garde, les laissant vulnérables à la détresse financière ou la ruine si la valeur de leurs investissements a reculé, même modestement. Par exemple, à partir de 2007, les cinq grandes banques d'investissement - Bear Stearns, Goldman Sachs, Lehman Brothers, Merrill Lynch et Morgan Stanley - étaient d'exploitation avec un capital extraordinairement mince. Par une mesure, leurs ratios d'endettement étaient aussi élevés que 40 à 1, ce qui signifie pour chaque $40 dans les actifs, il y avait seulement $1 de capital pour couvrir les pertes. »
Notez l'acceptation sans problème ici du fait que les banques ne peuvent créer de l'argent de rien, mais doivent elles-mêmes emprunter l'argent qu'elles prêtent.

La Commission reproche aux banques d'investissement et aux autres institutions financières de prendre de tels risques, mais les personnes impliquées dans ces décisions pourraient-elles avoir décidé autrement ? Pourraient-elles avoir décidé de renoncer à l’occasion de faire des « bénéfices considérables » qui étaient là à prendre ? Non, parce que si l'une d'entre elles avait décidé de ne pas poursuivre ces bénéfices, les autres auraient pris leur place avec enthousiasme. Ce n'était pas une erreur de leur part mais une décision logique. Étant donné que la recherche compétitive de profit est dans la nature du capitalisme, elles avaient à prendre les décisions qu'elles ont prises. En ce sens, la crise financière n'était pas évitable.

Il était en dehors de la compétence de la Commission d’examiner le boom immobilier dont l'effondrement en 2006 a déclenché la crise financière. Elle se borne à enregistrer que « lorsque les prix du logement ont baissé et les emprunteurs hypothécaires ont fait défaut, les lumières ont commencé à s’obscurcir à Wall Street ». Si elle était allée plus loin dans l'examen du boom de l'immobilier et des raisons pour lesquelles il s‘est terminé, la Commission aurait découvert qu'il s'agissait d'un cas classique de la recherche du profit conduisant à la surproduction (trop de maisons en cours de construction par rapport à ce que les gens pouvaient se permettre d'acheter) et peut-être aurait-elle révisé son point de vue que « les événements profonds de 2007 et 2008 n'étaient pas une inclinaison accentuée dans les cycles financiers et commerciaux que nous avons appris à attendre dans un système économique de marché libre ».


dimanche 13 février 2011

Egypte, Tunisie, Algérie : gare aux « avant-gardes »

« La Révolution en Tunisie ressemble par bien des aspects à la révolution russe de 1917 ; elle a commencé mais n’est pas finie. Elle a éliminé l’ancien régime mais n’a pas encore été capable de mettre autre chose à la place. C’est pourquoi il est possible que la révolution soit défaite, en particulier en l’absence de dirigeant authentiquement révolutionnaire. Si le Parti Bolchévik n’avait pas été là, la révolution de février aurait été défaite. »
Ainsi écrit le dirigeant trotskiste international Alan Woods le 15 janvier.

En effet Lénine fut le premier à élaborer de façon cohérente un projet de parti d'avant-garde. Dans sa brochure Que Faire ? (1902), se basant, sur la présupposition que « livrée à ses seules forces, la classe ouvrière ne peut arriver qu'à la conscience trade-unioniste », il en tira la conclusion que la conscience socialiste devrait lui être apportée par des « intellectuels révolutionnaires socialistes ». Il préconisait une organisation composée « avant tout et principalement d'hommes dont la profession est l'action révolutionnaire », c'est-à-dire un parti d'avant-garde, une minorité consciente, qui dirigerait la majorité inconsciente dans une insurrection.

Cette théorie était le contraire de celle de Marx qui proclamait que « l'émancipation de la classe ouvrière doit être l'oeuvre des travailleurs eux-mêmes » (Statuts généraux de l'AIT, 1864). Néanmoins la théorie de Lénine était attrayante pour les révolutionnaires anti-tsaristes en Russie puisqu'elle reflétait parfaitement leur aspiration à se substituer à la bourgeoisie privée, trop faible et trop liée au régime tsariste pour agir elle-même, dans la révolution anti-tsariste et bourgeoise qui se préparait — « bourgeoise » dans ce sens qu'elle allait écarter tous les obstacles féodaux au développement du capitalisme en Russie.

En 1917, suite à l'effondrement de l'Etat tsariste sous l'impact de la Première Guerre mondial, Lénine et les bolcheviques, organisés en parti d'avant-garde, s'emparèrent du pouvoir et liquidèrent le tsarisme et le féodalisme en Russie. A leur place ils développèrent l'industrie sous la forme d'un capitalisme d'Etat. Plus tard, sous Staline, grâce à son mono pole du pouvoir, cette avant-garde (ou plutôt la partie qui en restait après les purges de Staline) s'est transformée en nouvelle classe dirigeante et privilégiée, la bourgeoisie d'Etat qui règnait en Russie capitaliste d'Etat jusqu‘en 1991.

Du point de vue historique donc, la théorie du parti d'avant-garde était l'idéologie d'une future bourgeoisie d'Etat qui voulait utiliser le mécontentement des travailleurs et des paysans pour écarter la vieille classe dirigeante et s'installer à sa place.

Dans les pays moins développés cette idéologie joue le même rôle aujourd'hui : c'est l'idéologie des groupes qui aspirent à devenir une nouvelle classe dirigeante sur la base du capitalisme d'Etat. Mais à quoi cela sert-il de remplacer un pouvoir colonial ou une bourgeoisie privée par une bourgeoisie d'Etat, ou de remplacer une bourgeoisie d'Etat par une autre ?

Quelle leçon en tirer ? Que le parti d'avant-garde est à rejeter en tant que forme d'organisation de la classe travailleuse. Pour s'émanciper en établissant une société sans classes et sans salariat dans laquelle la communauté tout entière possédera et administrera démocratiquement, dans son propre intérêt, les moyens et instruments de production et de distribution des richesses (« le vrai socialisme ») les travailleurs n'ont pas besoin de leaders, ni de chefs, ni de dirigeants, ni de meneurs — ni d'aucune avant-garde quelle qu'elle soit — mais seulement de leur propre auto-organisation démocratique et d'une volonté socialiste résolue.

Une révolution dirigée par un parti d'avant-garde, étant une révolution minoritaire, ne conduirait inéluctablement qu'à un gouvernement par une minorité, comme l'histoire l'a démontré maintes fois. Seule une révolution majoritaire peut aboutir à une société sans classes.

Les travailleurs d'Egypte et de Tunisie, ayant gagné une mesure de démocratie politique dans laquelle la lutte de classes peut se dérouler plus facilement, seront bien conseillés de ne pas écouter les avant-gardistes au risque de voir s'installer à la place des anciens régimes une nouvelle dictature — comme effectivement s'est passé en Russie.

lundi 7 février 2011

L’Alternative

L'alternative au capitalisme, privé et d'Etat, c'est, pour le définir de façon un peu negative, un monde sans frontière, sans classe, sans Etat, sans salaire, sans argent. Ou, plus positivement :

Le nouveau système doit être mondial. Il doit être une communauté mondiale. On doit considérer le monde comme un seul pays et l'humanité comme un seul peuple.

Tout le monde collaborera pour produire et distribuer tous les biens et tous les services dont l'humanité aura besoin, chaque personne y prenant part librement de la façon qui lui convient le mieux.

Tous les biens et services seront produits pour le seul usage et, ayant été produits, seront distribués gratuitement, directement aux gens pour que les besoins de chacun d'entre eux soient pleinement satisfaits.

La terre, les usines, les machines, les mines, les routes, les chemins de fer, les navires et tout ce dont l'humanité a besoin pour continuer à produire ses moyens de vie appartiendront à l'humanité tout entier. 

mardi 1 février 2011

Réformisme ou révolution ?

« Réformisme ou révolution ? » n'est pas un faux dilemme. C'est réellement un choix à faire. Ou vous êtes pour la transformation rapide et radicale de la société en socialisme suivant la prise du pouvoir politique par une majorité socialiste (révolution), ou vous êtes pour la tentative de transformer la société graduellement, par pression sur les gouvernements capitalistes ou par votre propre participation dans la gestion du capitalisme (réformisme).

Le réformisme a échoué misérablement au cours des années et il en a résulté que ce n'est pas les partis sociaux-démocrates qui ont chances le capitalisme, mais plutôt le capitalisme qui a changé ces partis en gestionnaires de la société capitaliste

Le réformisme est basé sur une conception fondamentalement erronnée sur la manière dont fonctionne et doit fonctionner le capitalisme. Ils ignorant le fait que le capitalisme est un système de classe qui ne peut fonctionner que pour l'intérêt de la classe qui possède et contrôle les moyens de production. Le capitalisme fonctionne sur les profits tirés de la classe salariée et par conséquent ne peut être réformé de manière à fonctionner dans son intérêt.

Des réformes peuvent être mises en application sous le capitalisme, mais soit ces réformes servent les intérêts de quelque section de la classe capitaliste, soit leurs effets sont rendus nuls par le fonctionnement de l'économie capitaliste. Les réformistes, peuvent-ils nommer une seule réforme qui n'a pas connu ce sort ? La politique souvent proposée pour surmonter cela — une réforme suivant l'autre à un taux toujours croissant — est assez irréaliste, parce qu'une telle politique serait impossible sans un très haut niveau de compréhension politique de la part de la majorité de la classe salariée et si la classe salariée a atteint un tel niveau de conscience politique, ne devrait-elle pas plutôt abolir le capitalisme par le seul acte révolutionnaire d'expropriation de la classe capitaliste pour le bénéfice de la communauté tout entière ?

Les véritables réformes, c.-à-d., des mesures gouvernementales qui bénéficient à la classe salariée, ne sont pas possibles sous le capitalisme, sauf sur une base temporaire.

Par conséquent, baser une stratégie pour l'établissement du socialisme sur une réformation graduelle du capitalisme est futile. Non seulement une telle stratégie ne conduit pas vers le socialisme et n'améliore pas le sort de la classe salariée, mais aussi elle conduit le parti qui poursuit une telle stratégie à faire partie de la machinerie du gouvernement du capitalisme.

Ce ne sont pas les gouvernements, si bien intentionnés ou déterminés soient-ils, qui déterminent comment le capitalisme fonctionne ; c'est plutôt le fonctionnement du capitalisme qui détermine ce que les gouvernements peuvent faire. Le capitalisme est un système basé sur la vente pour le profit, un système qui ne peut fonctionner que dans l'intérêt de ceux qui possèdent et contrôlent les moyens de production. Ceci est un fait que tous les gouvernements, même ceux considérés comme « progressistes », doivent reconnaître tôt ou tard. Aussi longtemps que le capitalisme subsiste la priorité doit être donnée au profit. Par conséquent, tous les partis qui prennent part au fonctionnement du capitalisme — seul ou en coalition -- doivent inévitablement agir contre les intérêts de la classe salariée, non seulement parce que les profits sont issus de l'exploitation de la classe salariée mais aussi parce que la nature du profit signifie que la production ne peut être programmée pour satisfaire les besoins humains.

Le capitalisme est un système qui ne peut tout simplement être réformé de manière à fonctionner dans l'intérêt de la classe majoritaire de travailleurs salariés. La seule solution à leurs problèmes est l'établissement du socialisme, une société sans classes basée sur la propriété commune et le contrôle démocratique des moyens de production, avec une production basée sur l'utilité et les besoins et non sur le profit. L'unique programme socialiste est celui qui appelle à l'établissement du socialisme et qui ne contient aucune demande de réforme du capitalisme.