samedi 16 novembre 2013

Comment rendre l’argent superflu ?

Ce que n'est pas simplement l'abolition de toute forme de monnaie qu'on veut en laissant le reste du monde tel quel. Abolir l'argent en laissant la propriété privée en place amènerait le chaos. L'échange, c'est le transfert du droit de propriété sur quelque chose et le meilleur moyen pour le faire c'est via l'argent. D'ailleurs, c'est pourquoi l'argent a évolué. Ce que nous voulons c'est la disparation de toute forme de monnaie en la rendant pas nécessaire et on fait cela en abolissant la propriété privée, en faisant des ressources de la Terre le patrimoine commun de tous. Ce qui est produit fera également partie du patrimoine commun. Effectivement, dans une société où les ressources seront l’héritage commun de tous, les produits le seront également. Mais on ne vend pas ce qui appartient à soi. On le partage. On ne peut le vendre ou l'acheter, simplement le distribuer, le partager. Pour cela on n'a pas besoin d'un moyen d'échange qui finit simplement par disparaître. Ce n'est donc pas « l'abolition de l'argent ». C'est de faire les ressources de la planète le patrimoine commun de tous (l'abolition de la propriété privée sur la Terre est ses ressources naturelles et industrielles), ce qui rendrait l'argent superflu et inutile.

jeudi 17 octobre 2013

Travail libre ou emploi salarié ?

Dans le capitalisme, une immense quantité de travail humain et de ressources naturelles et matérielles est absorbée par des activités inutiles (ou, du moins, uniquement utiles dans le cadre de la société capitaliste) et nuisibles, telles que la banque, les assurances, la comptabilité, la publicité, le commerce, les activités liées à l’existence de l’argent (extraction et transformation des matières premières, fabrication du papier, impression des moyens de paiement, des tickets de toutes sortes, des devis et des factures, surveillance, comptabilité, transport, fabrication et entretien des machines et outils correspondants, etc.), l’industrie de l’armement, la construction des infrastructures militaires, judiciaires, carcérales, etc.

La suppression des activités industrielles et commerciales et des administrations inutiles, dangereuses ou gaspilleuses d’énergie permettra de réduire de manière considérable le nombre d’heures de travail nécessaires au bon fonctionnement de la société et d’alléger la charge du travail utile. Dans ces conditions, la pénibilité de certaines tâches s’en trouvera très réduite… sans oublier que, assurés de travailler, non plus pour un patron, mais dans leur propre intérêt, individuel et collectif, les membres de la société d'abondance ne considéreront plus le travail de la même manière car celui-ci perdra beaucoup de son caractère ingrat et rebutant.

Ainsi, les gens n’aiment pas le « travail » aujourd’hui parce que c’est essentiellement de l’« emploi », c’est-à-dire du travail effectué pour et dans l’intérêt de quelqu’un d’autre, l’employeur. Ce n’est donc pas un travail destiné à être intéressant ni gratifiant. Au contraire, l’employeur n’en a rien à faire s’il est répétitif, ennuyeux ou même, parfois, dangereux ; ce qui l’intéresse, c’est que le travail de son employé lui rapporte de l’argent.

De leur côté, ces mêmes travailleurs, qui sont rebutés à l’idée d’aller travailler pour un patron, sont prêts à passer du temps, à « travailler » dur parfois, pendant leur temps de loisirs, pour faire du jardinage ou le ménage, réparer leur voiture, aménager leur logement, bricoler, aider leurs enfants à faire leurs devoirs ou s’investir dans une association, c’est-à-dire à faire quelque chose qu’ils estiment utile, nécessaire, intéressant, gratifiant, épanouissant ou bénéfique.

Il en sera de même dans la société socialiste, où la relation exploiteur-exploité et le profit ayant disparu, les membres de la société auront la possibilité de travailler dans l’activité qui les intéresse le plus ou qui correspond le mieux à leurs capacités. Ce n’est donc pas le travail en tant que tel qui représente un problème, mais les conditions dans lesquelles s’effectue ce travail.

Dans une société socialiste l’activité productive prendra la forme d’une activité librement choisie, entreprise par les êtres humains en vue de produire les choses dont ils ont besoin pour vivre et apprécier la vie. Le travail productif nécessaire de la société ne sera pas effectué par une classe de salariés employés, mais par tous les membres, chacun coopérant selon ses capacités pour produire les choses nécessaires à la satisfaction des besoins individuels et communautaires. Le travail ne peut qu’être volontaire car il n’y aura pas de groupe ou d’organe social capables de forcer les gens au travail contre leur volonté.

samedi 14 septembre 2013

L’alternatif

Quelle est donc notre alternative au capita lisme (y compris le capitalisme d'Etat qui existe en Chine, au Venezuela etc.)? C'est le socialisme mondial. Un certain nombre d'auteurs sur l'écologie se rendent compte déjà qu'il n'y a pas de solutions nationales aux problèmes de l'environ nement, de la pollution et du gaspillage des ressources mondiales. La planète forme une entité écologique si bien que c'est seulement à l'échelle planétaire que peuvent être résolus les problèmes écologiques.

Malheureusement, cette conscience mondiale ne va pas assez loin et s'arrête à exiger la mise en place d'un gouverne ment mondial ou d'organismes mondiaux pour traiter des problèmes de l'environnement sans changer le fondement capitaliste de la société. C'est pourquoi les solutions qu'ils proposent ne peuvent être au mieux que des palliatifs; ils traitent des effets, laissant la cause — le monopole des ressources mondiales par une seule partie de la population humaine et la production de biens en vue du profit — intacte.

Pour nous il ne suffit pas d'avoir une admi nistration mondiale. Tout ce qui est dans et sur la terre doit aussi devenir le patrimoine commun de toute l'humanité. Seulement sur cette base-là, libérée des intérêts du capitalisme, l'humanité peut-elle rationnellement traiter la question de sa relation avec le reste de la Nature. La produc tion des richesses serait alors sous la direction démocratique sociale et serait actionnée non seulement pour faire face aux besoins, suivant le principe « de chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins », mais aussi de protéger l'environnement et de préserver intelligemment les ressources.


samedi 17 août 2013

Et les actes antisociaux ?

L'homme aurait peut-être certains instincts fondamentalement mauvais qui le pousser aient à commettre des actes antisociaux ? Mais cela n'est nullement prouvé, au contraire. Les études anthropologiques tendent à montrer que les hommes et les femmes, dans des sociétés basées sur la coopération et la propriété en commun (c'est-à-dire dans certaines communautés primitives), ne sont ni agressifs, ni compétitifs, ni violents.

Dans notre société par contre les actes antisociaux ont pris de telles proportions que beaucoup de gens sont tentés d'en attribuer la cause à la nature humaine. Comme d'autre part le système social dans lequel nous vivons s'est étendu pratiquement au monde entier, on trouve un peu partout les mêmes manifestations criminelles, et l'on en tire la même conclusion erronée : « voilà : même violence, mêmes crimes ici et là — ce doit être la faute de la nature humaine ». On devrait plutôt dire : « même système social partout, même division en deux classes où l'une possède pratiquement tout et l'autre pratiquement rien, même système du salariat, même besoin de la police et de l'armée pour maintenir le statu quo et protéger la propriété de la classe possédante — et donc mêmes réactions violentes chez ceux qui, dans cette société, pour une raison ou pour une autre arrivent moins bien que d'autres à supporter leurs mauvaises conditions de vie ».

Cela dit, s'il y avait, dans un monde socialiste, des problèmes d'ordre antisocial, ce serait aux membres de cette société de les résoudre selon chaque cas particulier. Ce qui est sûr c'est que la répression policière ne résout rien comme le montrent nos prisons plus pleines que jamais.


lundi 15 juillet 2013

Le socialisme: rêve ou réalité ?

La description du socialisme, c'est-à-dire d'une société sans argent où les moyens de production appartiennent à tous et où le travail volontaire de chacun produit des biens destinés à la satisfaction des besoins humains fait souvent s'exclamer notre interlocuteur « Mais c'est du pur rêve ! Et vous autres, socialistes, vous n'êtes vrai ment que des rêveurs ». L'accusation est grave car elle implique que nous, socialistes, travaillons à une tâche impossible et que notre activité est donc inutile.

Il y a en réalité, deux sortes de rêves et deux sortes de rêveurs. Certains rêves sont de simples rêveries sans forme précise et qui ne mènent jamais à la moindre action, alors que d'autres sont si nets et si forts dans l'esprit du rêveur que celui-ci cesse de rêver pour se mettre à agir afin que son rêve devienne réalité. Ce genre de rêve est un des grands motivateurs de l'humanité et se trouve à l'origine de la plu part des grandes réalisations. Le travail humain fait le reste.

Imaginons deux êtres humains dans un passé plus ou moins lointain, allongés tranquillement au bord d'une rivière et regardant passer les oiseaux au-dessus de leur tête. Leur rêverie suit le vol des animaux ailés et l'un d'eux s'exclame soudain : « Ça doit être drôlement bien de voler, comme ça, dans le ciel et de voir le monde d'en haut ». L'autre répond : « A quoi bon penser à ça ? Tu te vois voler avec tes bras et tes jambes et ta grosse tête ? Ce n'est pas dans ta nature de voler et tu n'as qu'à t'y résigner. » Mais dans l'esprit de celui dont l'imagination est la plus forte, le rêve a pris racine et les mots « comment faire ? » se sont formés silencieusement sur ses lèvres. Ce rêve, comme tant d'autres, naîtra dans d'autres esprits, se transmettra, et même si au XVe siècle, Léonard de Vinci ne pouvait encore que dessiner d'ingénieuses machines à voler, il ne perdait pas pour autant son temps, car aujourd'hui l'être humain vole plus haut, plus vite et plus loin que n'importe laquelle des créatures ailées. Malgré le fait que la « nature humaine » n'était pas de voler.

Mais la « nature humaine » n'est pas une donnée fixe. Elle semble limiter énormément l'être humain mais celui-ci, par son travail physique et intellectuel crée, à chaque moment de son histoire, de nouvelles conditions qui ouvrent la porte à de nouvelles idées qui à leur tour font entrevoir de nouvelles possibilités et naître de nouveaux rêves. Les forces naturelles, autre fois toutes-puissantes ne jouent plus qu'un rôle secondaire dans le destin de l'humanité et elles sont aujourd'hui remplacées, en particulier dans les pays développés du monde par les forces sociales et économiques, elles-mêmes crées par l'activité humaine.

Si les hommes et les femmes se considèrent compétitifs, agressifs, paresseux, égoïstes et donc incapables de vivre dans un système social tel que le socialisme, c'est parce que le système social dans lequel ils vivent fait ressortir en eux ces qualités. Ce système est lui-même basé sur l'égoïsme (nécessité absolue de l'accumulation du capital), la compétition (rivalité entre possesseurs de capital), l'agression (nécessité d'étendre et de défendre marchés et sources de matières premières), la paresse (la classe possédante et donc dominante n'a pas besoin de travailler et le fait de ne pas travailler devient un des critères du succès).

Ce qui s'oppose à une transformation radicale du système social ce n'est donc pas la « nature humaine », mais la prise de conscience, de la part de la majorité des travailleurs, hommes et femmes, du fait que ce sont eux qui créent, par leur travail, les conditions matérielles et sociales dans les quelles ils vivent et qu'il est donc en leur pouvoir de les changer s'ils le désirent.

Pourquoi cette prise de conscience ne se fait-elle pas en masse, dans toute société, ou du moins dans tous les pays avancés du monde ? Pourquoi les gens ne décident-ils pas de mettre fin à leurs difficultés matérielles et psychologiques en créant des conditions qui auront désormais pour but l'intérêt et le bonheur de l'humanité ? Il y a à cela une raison très simple. Le système actuel profite matériellement à une partie de notre société et cette partie, bien que très petite (environ 5 %) a le pou voir, grâce à son monopole des médias, d'imposer certaines idées et d'empêcher les autres, celles qui lui déplaisent, de se répandre. Elle fait donc absolument tout ce qu'elle peut, d'ailleurs aveuglément, pour conserver le statu quo. Je dis aveuglément car même pour cette minorité, un système social qu'elle n'arrive pas à contrôler et qui pourrait mener, d'un moment à l'autre, à l'anéantissement total de l'humanité, et donc d'elle-même, n'est pas sans inconvénients.

Lorsque l'on comprend cela, on comprend que les gens qui s'obstinent à imaginer un monde différent et à vouloir frapper aussi l'imagination de ceux qui restent prisonniers de leur réalité immédiate, que ces gens qui non seulement s'accrochent à leur rêve, mais y travaillent avec acharne ment en luttant contre les idées qu'on leur impose, en affirmant les leurs, on comprend que ces gens ne sont pas simplement des « rêveurs » mais des personnes décidées à tout faire pour transformer leur « rêve » en réalité.

L'idée du socialisme est, comme l'idée de voler, un de ces rêves qui semblent aussi vieux que l'humanité elle-même et qui a peut-être ses racines dans la réalité sociale de la longue préhistoire de l'espèce humaine. Le fait que ce rêve ne soit pas encore réalisé indique non pas qu'il est irréalisable mais seulement que les hom mes n'ont pas encore commencé à y travailler.

lundi 10 juin 2013

Abolissons le capitalisme

Le capitalisme est basé sur le monopole de la possession des moyens de production par une classe minoritaire et leur utilisation pour produire des biens et services à vendre avec en vue des profits. Le capitalisme est une société de classe dans laquelle les profits doivent passer avant les besoins humains. Cette loi économique du capitalisme ne peut être changée par une action gouvernementale, encore moins par des amendements à la Constitution.

C'est à cause de cette loi que les promesses des partis d'améliorer votre niveau de vie et sa qualité dans des domaines tels que le logement, l'enseignement et l'environnement ne peuvent pas être honorées. Peu importe les partis qui gagneront, les problèmes resteront les mêmes. Ce n'est pas que les candidats qui font ces promesses sont nécessairement malhonnêtes, mais parce que, comme nous l'avons dit, le capitalisme ne peut être réformé et planifié de manière à fonctionner dans l'intérêt de la classe majoritaire de travailleurs salariés. C'est un système générateur de profits qui ne peut fonctionner que dans l'intérêt d'une infime minorité — ceux qui vivent de ces profits.

C'est pourquoi nous, socialistes-mondialistes, disons que la seule manière de résoudre les problèmes auxquels fait face la classe majoritaire dans la société est d'abolir le capitalisme, et non pas de le réformer, et de le remplacer par une nouvelle société basée sur la propriété commune et la gestion démocratique des moyens de production par et dans l'intérêt du peuple entier.

Sur cette base, les biens et les services pourront être produits pour la seule satisfaction des besoins humains au lieu de l'être pour les profits. Il n'y aurait donc aucune restriction monétaire ou financière en ce qui concerne les maisons, les écoles, les hôpitaux, le transport en commun et les autres services requis pour satisfaire les besoins des gens. En fait, il n'y aura aucun besoin d'argent, de salaire, de profit, de banque et de tout le bataclan sur l'achat et la vente. Le principe socialiste « De chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins » sera mis en pratique. Les gens travailleront au mieux de leur connaissance et habilité à produire une abondance de biens et services auxquels ils auront libre accès selon leurs besoins individuels. Violà ce que signifiaient originellement les termes « socialisme » et « communisme » et ce qu'ils signifient toujours pour nous. Une telle société socialiste ne peut être établie que lorsqu'une majorité le désirera et le comprendra et utilisera l'action politique démocratique et révolutionnaire — c'est-à-dire avec pour but de changer la base de la société — pour ce faire.

vendredi 10 mai 2013

Assez pour tous

Les arguments en faveur d’une économie dans laquelle la production vise à satisfaire les besoins humains et où la production pour la vente et l’économie marchande sont abolies, reposent sur le fait suivant : l’industrie moderne et la technologie se sont développées à un tel degré qu’elles pourraient fournir en abondance des biens de consommation et services à toute la population du monde, à condition qu’elles soient utilisées rationnellement pour arriver à ce but.

Les problèmes d’une production en quantité suffisante pour tous sont déjà résolus. Après de longs efforts pour combattre la pénurie l’humanité est venu à ses bouts et la possibilité de produire en abondance est devenue une réalité. Mais ceci ne peut être accompli dans le cadre d’une société où les moyens de production sont la propriété d’une minorité et où les richesses sont produites pour la vente en vue de profits. Le seul cadre où cette abondance serait réalisable est celui d’une société dans laquelle toutes les ressources, qu’elles soient naturelles ou industrielles, sont devenues l’héritage commun de toute l’humanité. Dans ces conditions seulement, est-il possible de décider rationnellement ce qui sera produit et satisfaire les besoins humains. Dans une telle société, marché, salaires, profits, achat et vente seraient hors de contexte ; ils finiraient simplement d’exister.

Une société d’abondance n’est pas l’extension de notre prétendue société de consommation caractérisée par son énorme gaspillage de ressources ; cela ne signifie pas que les gens acquièrent de plus en plus de gadgets inutiles et qui gaspillent des ressources, mais tout simplement que les besoins matériels des gens, à la fois en tant qu’individu et en tant que communauté, soient satisfaits d’une façon rationnelle. Contrairement à la croyance générale que cultivent prudemment les défenseurs du capitalisme, l’homme n’est pas avide par nature et les besoins humains ne sont pas sans limite. Du point de vue matériel, un être humain a besoin d’une certaine quantité et variété de nourriture, vêtements et abris et bien vite chaque individu pourra découvrir ce qu’elles sont dans son propre cas. Cela aurait lieu si les biens et les services pouvaient être utilisés librement et gratuitement.

Mais, on peut faire objection, avec cette utilisation libre les gens prendraient au-delà de leurs besoins. Mais au contraire, pourquoi agiraient-ils ainsi alors qu’ils seraient assurés (et ils le seraient vu la puissance productrice de l’industrie moderne et le fait que les que les moyens de production seront devenus l'héritage commun de tous) d’une production toujours subvenant aux besoins de tous ? Après tout, aujourd’hui, l’utilisation de l’eau (ou du moins la quantité d’eau consommée à n’importe quel moment) est gratuite, et les gens n’utilisent que ce dont ils ont besoin pour laver, cuisiner, etc. Pareillement, lorsque tous les besoins de consommation et les services seront librement et gratuitement disponibles, on peut s’attendre à ce que les gens ne prennent de nourriture, vêtements, etc., que selon leurs besoins. En prendre davantage serait anormal et sans intérêt.

Mais est-ce que l’industrie moderne peut vraiment fournir suffisamment pour tous et ainsi permettre l’utilisation libre et gratuite des biens de consommation et des services ? Ceci est indéniable, dès que l’on aura supprimé les gaspillages du capitalisme. Citons tout d’abord les forces armées, l’armement, et en deuxième lieu tout le personnel, tous les bâtiments et tout l’équipement employés pour le marché et l’économie marchande en général : banques, assurances, services gouvernementaux à la charge des pensions et des impôts, vendeurs, contrôleurs, comptables, caissiers, etc. En vérité, on peut dire que sous le capitalisme bien plus de la moitié de la population est employée dans de pareilles activités improductives. Et troisièmement la production vise à ce que les produits deviennent rapidement surannés en les fabriquant pour se casser ou s’user en comparativement peu du temps. Dans une société organisée rationnellement, les biens de consommation pourraient être fabriqués de manière à durer et cela résulterait en une énorme économie de ressources.

En éliminant ces trois causes de gaspillages inhérentes au capitalisme, on pourrait produire en quantité suffisante pour nourrir, vêtir et loger convenablement tout le monde, si bien que, de nos jours, le seul programme réaliste est le suivant :  Abolition de l’argent, utilisation gratuite des richesses par tous selon les besoins individuels, tel que l’énonce le vieux mot d’ordre : « de chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins ».


dimanche 21 avril 2013

L’abondance tue les profits

Effectivement l'appareil productif actuellement à la disposition de l'humanité est capable de fournir une abondance de biens et de services pour la satisfaction des besoins humains. Autrement dit, on a résolu le problème de la production. On a vaincu la rareté. La plupart des gens, cependant, continue à subir, à des degrés divers, la rareté. Cette contradiction s'explique par le fait que le système de distribution, de répartition, des richesses reste toujours fondé sur l'âge de la rareté. Le système de prix-salaires-profits ne correspond plus aux exigences de la technologie.

Le but de la production aujourd'hui n'est pas la satisfaction des besoins humains, mais c'est de faire des profits. « Pas de profit, pas de production » est la règle économique fondamentale d'aujourd'hui. C'est pourquoi la production s'arrête bien avant que les besoins humains soient satisfaits. Si, dans le système actuel, on utilisait l'appareil productif à sa pleine capacité il résulterait une telle abondance de richesses que les prix auraient tendance à tomber vers zéro. On ne ferait plus de profits et on ne gagnerait donc plus d'argent, ni pour entretenir ceux qui vivent des profits ni pour réinvestir dans la production. Tout simplement l'abondance tue les profits.

C'est pourquoi ceux qui gèrent le système économique actuel sont obligés de faire tout ce qu'ils peuvent pour empêcher l'abondance de se manifester. Ils sont obligés de maintenir une rareté artificielle afin de préserver le profit, sans lequel le système actuel ne peut fonctionner. En plus, le système de prix-salaires-profits est non seulement un système de rareté artificielle, c'est aussi un système de gaspillage organisé : les biens sont fabriqués pour ne pas durer trop longtemps afin de maintenir des ventes et ainsi des profits



samedi 5 janvier 2013

Eric Hobsbawm, historien et léniniste

( article du Socialist Standard, mensuel du SPGB, Parti socialiste de Grande-Bretagne, de novembre 2012, traduit par Critique sociale)


Le décès d’Eric Hobsbawm le 1er octobre a marqué la fin d’une génération d’historiens de gauche qui, tout en défendant le matérialisme historique, ont rejeté la politique marxienne en adoptant le léninisme.
Les figures principales de ce groupe furent E.P. Thompson, Christopher Hill et Rodney Hilton, mais la liste inclut aussi Maurice Dobb, A.L. Morton, Dorothy Thompson, John Saville, Victor Kiernan, Raphael Samuel et George Rudé. Ils entrèrent au Parti communiste de Grande-Bretagne (CPGB) et furent actifs au sein du Communist Party Historians Group. En dépit de leurs carences politiques, dans les décennies qui suivirent la Seconde Guerre mondiale leurs travaux faisaient partie de ce qui défiait l’Histoire aride de la haute politique des « grands hommes », qui avait précédemment dominé les études historiques universitaires. Certains continuèrent leur activité en fondant la Society for the Study of Labour History (société pour l’étude de l’histoire du mouvement ouvrier), et prirent part à l’essor et à l’établissement de l’histoire sociale « par en bas » comme discipline académique. Ils produisirent des œuvres qui furent parfois chaudement accueillies par des militants du socialisme désireux d’acquérir des connaissances dans une perspective historique matérialiste. Une partie du travail de ce groupe continuera à être une ressource fertile pour les militants du socialisme. Si seulement ils avaient pu appliquer leur matérialisme historique aussi rigoureusement à leur propre époque qu’à celles qu’ils étudiaient respectivement, ils ne se seraient probablement pas affiliés au léninisme.
Hobsbawm, à l’instar de nombreux historiens membres du Parti communiste qui devinrent plus tard des figures éminentes, se radicalisa durant l’Entre-deux-guerres, plaçant ses espoirs dans l’Union soviétique. Cependant la plupart d’entre eux quittèrent le Parti communiste après la répression russe du soulèvement hongrois de 1956, déjà désillusionnés par une compréhension naissante des horreurs de la Russie de Staline et de la répression d’Etat permanente. Hobsbawm se singularisa en ne quittant pas le Parti communiste, dont il demeura membre jusqu’à son effondrement, et continua dans une certaine mesure de faire l’apologie du bolchévisme jusqu’à sa mort.
Hobsbawm ne fut pas un stalinien impénitent, se faisant l’avocat de l’eurocommunisme dans les années 1970 et soutenant la réforme du Labour Party de Neil Kinnock dans les années 1980, mais il garda l’idée que l’Union soviétique était une expérience valable qui avait mal tourné. Dans ses mémoires il écrivit : « le rêve de la révolution d’Octobre est toujours quelque part en moi […] Je l’ai abandonné, ou plutôt rejeté, mais il n’a pas été effacé. Jusqu’à ce jour, je me surprends à traiter la mémoire et la tradition de l’URSS avec indulgence et tendresse »2. Dans un article pour le Guardian du 14 septembre 2002, Hobsbawm écrivit : « Dans les premiers temps nous savions qu’un monde nouveau était en train de naître dans le sang, les larmes et l’horreur : révolution, guerre civile, famine… Du fait de l’effondrement de l’Ouest, nous avions l’illusion que même ce système brutal, expérimental marcherait mieux que l’Ouest. C’était ça ou rien. »
Mais ce n’était pas « ça ou rien ». En tant que membre du CPGB, Hobsbawm a soutenu l’Union soviétique parce qu’elle représentait l’espoir de ceux qui croyaient de façon erronée qu’une forme brutale de capitalisme d’Etat pouvait se transformer en une véritable société socialiste. En tant que tel il était un adversaire du Parti socialiste de Grande-Bretagne, qui, déjà à l’époque, entendait établir le socialisme sur la base de la propriété commune réelle et du contrôle démocratique des moyens de production, sans « période de transition » impliquant un capitalisme d’Etat. Dans un de ses articles, d’abord publié dans la New Left Review, Hobsbawm écrivit au sujet de H. M. Hyndman et de la Social Democratic Federation (SDF), et qualifia le Parti socialiste de Grande-Bretagne de « secte complètement hors sujet ». Historien pourtant connu pour son souci du détail, il data malencontreusement la fondation du parti en 1906 au lieu de 1904. Ceci est sans doute dû au fait que, comme la plupart des historiens qui rejetaient d’un revers de main ce parti, il n’avait jamais pris le temps d’examiner sérieusement son arrière-plan historique ou ses archives.
L’article continuait par un appel à une réévaluation de la SDF qui avait jusque-là été méprisée par les historiens de gauche. La SDF, avançait Hobsbawm, avait démontré sa longévité, avait un caractère prolétarien et de nombreux travailleurs de gauche en avaient été membres. Elle était caractérisée non par le sectarisme mais par une bien compréhensible intransigeance (même si, en bon bolchévik, Hobsbawm remarquait que la SDF était « largement incapable d’envisager […] les problèmes de la révolte ou de la saisie du pouvoir »). La reconnaissance habilitée des réalisations de la SDF par Hobsbawm est également applicable à la place historique du Parti socialiste de Grande-Bretagne dans la vie politique de la classe ouvrière britannique. Mais une chose le met hors-jeu pour toute inclusion dans les archives du socialisme en Grande-Bretagne pour les historiens de gauche : il ne s’est pas joint à la formation du CPGB en 1920, mais s’y est opposé. Pour Hobsbawm, la SDF avait du crédit en tant qu’elle faisait partie des antécédents politiques britanniques à l’origine du CPGB. Le Parti socialiste de Grande-Bretagne a défendu le socialisme tel que l’entendait Marx – contre le marché et contre l’Etat – et était de ce fait anti-bolchévik. À cause de cela, ce parti fut ignoré ou sommairement rejeté par les historiens du communisme et du mouvement ouvrier, qui étaient généralement léninistes, trotskistes ou travaillistes.
La déception face aux réalités de l’Union soviétique a mené de nombreux contemporains d’Hobsbawm au sein du CPGB à une désillusion extrême, puis à des trajectoires du même ordre dans différentes variantes politiques de gauche. Alors que cette génération d’historiens appartient désormais elle-même au passé, le Parti socialiste de Grande-Bretagne continue la tâche qu’ils ont ignorée, celle d’essayer de faire la révolution socialiste que le Parti bolchévik de Russie n’est jamais parvenu à faire. Cette tâche implique nécessairement la compréhension et le rejet de la stratégie de la saisie insurrectionnelle du pouvoir d’Etat et de l’instauration d’un capitalisme d’Etat comme chemin vers le socialisme. Les militants du socialisme d’aujourd’hui ont toujours autant de travail à effectuer pour extirper les mots de socialisme et de communisme de leur association avec le capitalisme d’Etat et la brutalité de la stratégie politique soutenue par Hobsbawm.


Notes:
1 Parti d’extrême-gauche britannique existant depuis 1904 (voir le site internet worldsocialism.org/spgb ). Traduction de Critique Sociale, publiée avec l’accord du SPGB.
2 Interesting Times, p. 56. Traduit en français sous le titre Franc-tireur, autobiographie (publié par Ramsay en 2005, réédité par Hachette en 2007).